• Connaître son poids naturel… et l’accepter

    Connaître son poids naturel… et l’accepter

    Et si notre poids était aussi génétiquement déterminé que l’est notre taille ? Et si notre organisme régulait lui-même ses apports caloriques? Ce discours novateur de certains nutritionnistes annonce peut-être la fin des régimes. En tout cas, un vrai changement de mentalité.

    Elodie Liénard

    Personne n’a jamais eu l’idée de vouloir atteindre 1,70 mètre quand il mesure 1,65 mètre (sauf en portant des talons…). En revanche, on ne compte plus le nombre de ceux qui dépensent une énergie folle pour perdre cinq kilos. Et si c’était vain ?

    Bien sûr, le poids dépend du rapport entre les entrées (alimentation) et les dépenses (activité physique, métabolisme de base). Selon cette logique, pour maigrir, il suffirait de réduire les premières et d’augmenter les secondes. Pas si simple. « Comme pour la plupart des variables biologiques – température, pression artérielle, glycémie, etc. –, c’est l’organisme qui régule la masse grasse pour qu’elle soit relativement constante », explique Jean-Philippe Zermati, nutritionniste. Cette régulation naturelle s’effectue en partie grâce à nos sensations de faim ou de satiété, qui nous permettent de contrôler ce que nous mangeons. C’est pourquoi, sur le long terme, le poids de la plupart d’entre nous varie peu. « Un individu qui dépenserait quotidiennement deux mille cinq cents calories et en consommerait, chaque jour, vingt-cinq de plus – soit une différence de 1 %, l’équivalent de la moitié d’un yaourt nature – verrait son poids augmenter de neuf kilos en dix ans », précise le nutritionniste.

    Sa conclusion : ceux dont le poids est stable sur une aussi longue période adaptent leurs besoins alimentaires à leurs dépenses, sans même commettre une hausse de 1 % ! Ils sont à leur poids d’équilibre, ce poids « naturel » que les scientifiques appellent « set point » (prononcez à l’anglaise).
    Mais comment savoir si nous sommes à notre poids naturel ? « Le set point est le poids stabilisé d’un individu quand il mange strictement à sa faim », déclare Jean-Philippe Zermati. Pour simplifier, les personnes qui n’ont absolument aucun problème avec la nourriture, qui ont une relation tout à fait saine à leur alimentation sont à leur poids naturel. Même si ce poids ne leur convient pas…

    C’est là que le bât blesse : pour une même taille, certains se régulent « naturellement » à 60 kilos et d’autres à 70 ou 80… Et les scientifiques ne savent pas véritablement pourquoi. Deux pistes sont explorées. La piste génétique : nous aurions hérité de nos lointains ancêtres la faculté de résister à la perte de poids (très utile alors en période de famine). Dans certaines familles, chez certaines personnes, cette résistance à l’amaigrissement (qui s’exprime vraisemblablement dans les gènes) serait plus marquée. La piste sociologique : la majeure partie d’entre nous dispose d’un système de régulation du poids qui fonctionne convenablement dans des conditions de vie « normales ». Or l’abondance de l’offre alimentaire solliciterait ce système de façon excessive. D’où le nombre grandissant de personnes ayant des problèmes de poids.

    Ces personnes dont le poids naturel est élevé peuvent être réparties schématiquement en trois catégories : les "naturellement" gros, les dérégulés et les insatisfaits chroniques.

    Les naturellement gros

    Leur set point est trop élevé à cause de facteurs génétiques (mise en évidence récente d’un gène de l’obésité : le GAD2), de maladies (comme certaines tumeurs cérébrales), de troubles hormonaux, de l’arrêt du tabac, de la prise de certains médicaments… « Neuf cent quatre-vingt-dix-neuf obèses sur mille ont une régulation pathologiquement trop élevée », souligne Marc Fantino, physiologiste. « Ils mangent à leur faim mais leur poids reste élevé », ajoute Jean-Philippe Zermati. Maigrir devient alors très difficile. Cela suppose de manger moins qu’à sa faim, ce qui est impossible à long terme. Leur seul espoir : la recherche pharmacologique. Et il précise : « Seul un médicament faisant baisser le set point pourrait faire maigrir les grands obèses. »


    Les dérégulés

    Stress, fatigue, angoisse : ils confondent ces symptômes avec de la faim et mangent alors qu’ils ne le devraient pas. En fait, ils mangent plus qu’à leur faim pour apaiser leurs tensions. En effet, la consommation d’un aliment déclenche une sécrétion de bêta-endorphines. « Les personnes stressées ont inconsciemment compris que, en mangeant, elles soulageaient transitoirement un état de stress. D’où le risque de prendre l’habitude de manger pour de mauvaises raisons et de stocker les calories », explique la physiologiste Jeannine Louis-Sylvestre. Leur système de régulation est perturbé et le set point est dépassé.

    Si la situation perdure, ce set point augmentera définitivement et la perte de poids deviendra impossible. Quelqu’un qui mange plus qu’à sa faim fait augmenter sa masse graisseuse. Les adipocytes (cellules graisseuses) prennent alors du volume. Jusque-là, le phénomène est réversible : il suffit de manger à nouveau à sa faim pour maigrir. Mais si la personne persiste à dépasser sa faim, les cellules graisseuses atteignent leur taille maximale et se multiplient. Le phénomène devient irréversible. Le système de régulation s’adapte à la nouvelle donne et le set point se décale. Au lieu de se réguler à 60 kilos, l’organisme se régule à 80 ! La personne a définitivement pris du poids.

    Pour éviter d’en arriver là, une seule solution : travailler sur nos sensations alimentaires. Savoir reconnaître quand nous avons faim et éviter de manger pour satisfaire d’autres besoins, comme calmer une colère ou combler une frustration.


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